Je suis une lectrice assidue de Psychologie Magazine, qui met très bien en lumière, certains de nos comportement et, surtout, surtout qui nous explique pourquoi. Dans sa rubrique BEAUTE, on nous explique ‘Notre Rapport à la Beauté’ et je n’hésite pas à vous faire partager ce qui est dit.

Surtout quand on connait la composition d’une crème et que les actifs qui la constituent à hauteur de 10%, ne leur coûtent que 2 à 3 euros maximum. On paie vraiment cher le rêve.

Le Claim de l’Oréal « Parce que je le vaux bien » est parfaitement réaliste. Que valons-nous au juste???

Concentré de la Mer: 410€ !!!

Voici l’article:

La cosmétique doit-elle nous « coûter » pour être efficace, épousant ainsi les dogmes de la psychanalyse ? Et que répare-t-elle au juste ? Quand la surface parle de la profondeur.

L’auteur :Ariane Le Febvre Flavia Mazelin-Salvi

Deux cent quarante, trois cent quarante, quatre cent vingt, huit cent quarante euros… Les prix s’envolent dans l’univers des soins antirides pour le visage. Mais le phénomène gagne aussi les soins pour le corps ou le contour des yeux ainsi que ceux destinés aux hommes. Et ces crèmes cinq étoiles rencontrent leur public. Dix mille crèmes Diamant de beauté de Carita à cinq cents euros ont été vendues en 2009. La gamme Orchidée impériale de Guerlain (de cent cinquante à trois cent vingt-sept euros) a enregistré une croissance de 34 % en 2010 par rapport à 2009 (Source : NPD France/YTD, décembre 2010).

Au fait, à partir de quel prix une crème est-elle considérée comme chère ? La réponse diffère évidemment selon que l’on est acheteur ou responsable de marketing. Pour les premiers, et d’après notre enquête, cent euros semblent être le seuil plafond. Pour les seconds, « la parfumerie sélective s’accorde à dire qu’un produit est “premium” au-delà de cent cinquante euros », avance Fabienne Gambart, directrice marketing France de La Prairie.

Du côté des consommateurs, les avis sont tranchés et le débat, idéologique. Les prix des crèmes de luxe sont jugés exagérés par les uns, « surtout en temps de crise », insiste Isabel, 42 ans, au pouvoir d’achat pourtant confortable, qui ne voit dans ces produits qu’une réussite éclatante du marketing. « Ce sont des prix justifiés par l’excellence des produits et les moyens de recherche mis en œuvre pour atteindre cette excellence, argumente, Léa, 38 ans, qui économise pour s’offrir un de ces soins haut de gamme. Je ne prive mes enfants de rien, je passe après eux. Mais une fois, j’aimerais goûter à ce luxe, ce serait une façon de me dire : “Tu le mérites !” »  Crème Orchidée Impériale de Guerlain: 420€ seulement !!!

Le prix de l’excellence et du rêve

On l’aura compris, au-delà des questions de budget, les crèmes de luxe et leur prix interrogent nos valeurs, notre désir, l’estime que nous nous portons… Quel prix sommes-nous prêts à payer et surtout pourquoi ? Les rationnels rétorqueront que la seule performance des produits explique l’achat et la fidélisation. Avoir accès au meilleur, certes, mais peut-être aussi s’accorder les soins dont nous avons manqué, tenter de nous assurer de notre valeur personnelle, de dérober un peu de réconfort et de magie dans un monde qui n’est pas toujours tendre…

Un produit trop accessible peut faire douter de son efficacité. Globalement, cela ne se justifie que pour les produits fonctionnels : un gel douche, un dentifrice, un dissolvant… Pour les soins cosmétiques, l’exigence est toute autre. Nous réclamons pour notre visage, très fortement investi, le meilleur de la technologie, les ingrédients les plus performants, les textures les plus agréables. Plus le prix est élevé, plus la promesse implicite – « nous vous offrons le meilleur » – semble respectée. À la prouesse technologique s’ajoute la dimension du désir : le luxe et la volupté garantis par des packagings au raffinement d’orfèvrerie et servis par des histoires en forme de contes de fées modernes – un double emballage qui flatte notre ego et qui explique l’effet placebo du prix. (Crème Authent de Ménard: 840€ !!!)

Selon Marie-Noëlle Maston-Lerat, psychologue clinicienne, psychothérapeute et auteure de Psychogénéalogie, relation à l’argent et réussite (Éditions Quintessence, 2006), le storytelling des marques de luxe a en plus sur nous un effet « qui relève de la pensée magique, ainsi que d’un idéal du moi tout-puissant. Nous voulons croire qu’une crème a le pouvoir de nous faire revenir en arrière. Il y a un déni de l’irréversibilité ». Plus le prix est extraordinaire dans le sens où il sort de l’ordinaire, donc du réel, plus nous croyons, inconsciemment, à son pouvoir magique. Marie a « investi » dans une crème « caviar », comme elle les appelle, le jour de ses 45 ans, il y a trois mois. Une joyeuse célébration narcissique, mais dont la dimension « conjuration de mauvais sort » ne lui a pas échappé. « Le cap des 45 ans, la préménopause, le relâchement de la peau… tout ça m’angoisse, alors cette crème au prix indécent, c’est mon bouclier, mon gri-gri, mon arme secrète, confie-t-elle. Elle m’enveloppe, me protège, je crois en son pouvoir, donc ça ne peut que marcher ! » Le sacrifice qu’un tel achat peut constituer pour certaines peut aussi renvoyer à l’adage « Il faut souffrir pour être belle ». La beauté a un prix. La souffrance, financière, est alors, logiquement, son tribut.

La valeur de l’estime de soi

Impossible, dans notre monde, de séparer rareté et cherté. Si le rare est convoité, c’est parce qu’il distingue, élit, élève au-dessus de la masse. Il y a « moi », précieux, préféré, et « les autres », foule indistincte. Et la rareté acquiert d’autant plus de valeur qu’elle est convoitée. C’est ainsi, sur une équation aussi simple qu’efficace, que fonctionne depuis toujours la loi marchande du désir qui joue sur nos besoins affectifs primaires. Être distingué du lot.

Une grâce qui vient renforcer notre narcissisme si souvent fragilisé. « Se donner du luxe revient très souvent à se donner l’amour ou l’attention que l’on n’a pas reçus enfant, ou alors insuffisamment », constate la psychanalyste et sexologue Catherine Blanc. Je passe doucement sur mon visage le soin précieux qui me fera du bien… Moins le visage a été regardé et touché avec amour et émerveillement, plus nous chercherons des mains et des regards de substitution. Un masque, une crème… l’amour de l’autre et l’estime de soi en pots.

« Dépenser beaucoup cache souvent un sentiment de dévalorisation et de culpabilité. Pour de nombreuses personnes, l’argent compense le manque maternel et protège comme le feraient de bons parents », explique Marie- Claude François-Laugier, psychologue clinicienne, psychanalyste et auteure de Comment régler ses comptes avec l’argent (Payot, 2004).

Le soin Noir de Givenchy : 340€ !!

Marie-Noëlle Maston-Lerat insiste sur les vertus consolatrices de ces crèmes précieuses que l’on applique avec une attention toute particulière. « Elles comblent et caressent la peau, mais aussi l’être. Elles pénètrent à l’intérieur. La personne prend le temps d’appliquer son soin, de nourrir sa peau comme elle nourrirait un bébé. » L’achat peut être impulsif. Plus l’angoisse et le malaise sont importants, plus le prix est élevé et la culpabilité, pesante. « Ces “craquages” sont souvent le fait de personnalités compulsives, qui ont du mal à se projeter dans le futur, analyse la thérapeute. La crème les console immédiatement en étayant leur narcissisme. » L’achat d’un soin de luxe joue aussi sur le côté obscur du plaisir. Le prix élevé érotise le produit en attisant le désir de possession ; son acquisition, surtout s’il « coûte », s’accompagne du frisson de plaisir coupable et de transgression. C’est cher, donc c’est mal, donc c’est bon. Un résumé simpliste ? Pas si sûr. Demandez à votre inconscient.

Finalement, plus on met des crèmes chères, plus nous sommes quelqu’un qui a besoin de se valoriser.  N’y  a-t-il pas d’autres moyens plus efficaces et moins onéreux?

Et, si on se faisait confiance tout simplement en développant notre Savoir pour refuser d’être manipulé et en le partageant autour de nous?